C’est en 1511, avec l’arrivée du colon espagnol Diego Velázquez de Cuéllar, que l’île de Cuba recense la première production de jus de canne à sucre.
À cette époque, la canne à sucre était broyée en faible quantité dans de petits moulins rudimentaires, les trapiches, pour en extraire le jus appelé le guarapo.
Les prémices du rhum cubain
Au début du XVIIe siècle, plusieurs trapiches rudimentaires sont transformés en installations plus sophistiquées, capables de raffiner le sucre. C’est ainsi que les premières raffineries naissent à Cuba où elles sont appelées centrales.
En 1640, l’île compte déjà 60 centrales. C’est au milieu du XVIIIe siècle que l’industrie sucrière de l’île de Cuba connaît un tournant majeur.
De mars à août 1762, dans le cadre de la guerre de Sept Ans, la guerre fait rage entre l’armée espagnole et l’armée britannique. Les forces britanniques prennent d'assaut la ville de La Havane et en prennent possession. La ville sera rendue aux Espagnols suite au traité de Paris de 1763.
Cette brève occupation anglaise aura eu un impact majeur sur l’industrie sucrière de l’île. Les Britanniques accentuent l’ouverture du commerce avec les Treize colonies anglaises d’Amérique du Nord.
Après avoir repris possession de l’île, l’Espagne ne manquera pas de promulguer des lois favorisant la production de sucre, de mélasse et de rhum cubain. Cette production connaîtra une croissance spectaculaire.
En 1777, ce sont plus de 13 000 hectolitres de rhum qui sont exportés aux États-Unis d’Amérique, pour atteindre les 75 000 hectolitres au début du XIXe siècle.
Au cours de ce siècle, tout s’accélère. La révolution industrielle introduit les machines à vapeur qui révolutionnent les centrales, donnant lieu à des moulins avec une capacité de broyage beaucoup plus importante.
C’est aussi au XIXe siècle que les mastodontes du rhum cubain que l’on connaît aujourd’hui font leur apparition, comme le rhum Bacardi en 1862 et le rhum Matusalem en 1872.
La prohibition américaine propulse le rhum cubain
En 1920, l'adoption de l’Acte National de Prohibition, aussi appelé Acte Volstead, par le président Woodrow Wilson marquait l'apogée de décennies de mouvements pour la tempérance.
Durant cette période, l’île de Cuba se voit être élue destination principale pour tout type de festivité, notamment les wet week-ends (fins de semaine arrosées).
Un grand nombre de cocktails à base de rhum émergent, comme le Daiquiri ou le Cuba Libre, ces cocktails cubains par excellence, popularisés en grande partie par Constantino Ribalaigua et Ernest Hemingway.
Certes, la production de rhum pour l’exportation vers les États-Unis connaît une baisse importante, mais les distilleries continuent de produire de l’alcool à d’autres fins (médicinales, cosmétiques, industrielles, etc.).
En 1936, les quelques centaines de distilleries en activité sur l’île de Cuba produisent plus de 200 000 hectolitres de rhum et exportent plus de 30 000 hectolitres, les plus célèbres producteurs étant Bacardi et Matusalem.
Le rhum cubain à son apogée
Dès 1940, l’industrialisation entraîne une augmentation significative de la production sucrière à Cuba. La production passe de 1,3 million de tonnes en 1905 à près de 6 millions de tonnes dans les années 1950. Cependant, cette hausse s’accompagne d'une réduction drastique du nombre de centrales sucrières, qui diminue de 181 à 101 sur la même période.
Le 1er janvier 1959, Fidel Castro prend le pouvoir et fait de la production de canne à sucre et de rhum une priorité nationale. Le 13 octobre 1960, il nationalise les 105 centrales sucrières et les 19 distilleries présentes sur l’île.
À cette époque, Cuba était le plus grand producteur mondial de canne à sucre, avec plus de 1,2 million d’hectares cultivés. Toute l’économie du pays dépendait de cette production massive. Aujourd’hui, Cuba produit 12 millions de tonnes de sucre, réparties sur un peu plus de 400 000 hectares.
Deux distilleries de rhum cubain emblématiques
Le marché du rhum à Cuba occupe une part importante à l’échelle mondiale. On parle ici d’une production de plus de 55 millions de litres de rhum par an.
Les volumes colossaux de 35 millions de litres de rhum se trouvent dans la catégorie d'entrée de gamme, consommés sur toute l'île sans marque spécifique ni reconnaissance officielle.
La distillerie Havana Club
La marque Havana Club est née en 1934, à la fin de la prohibition américaine, à la distillerie Vizcaya, détenue par la SA de José Arechabala y Aldama.
José Arechabala y Aldama avait construit la distillerie en 1878 à Matanzas. Jusqu’en 1898, toute sa production était écoulée sur l’île et vers l’Espagne. Ce n’est qu’après la Première Guerre mondiale que la distillerie commence à exporter son rhum vers les pays d’Amérique du Sud et certains pays d’Europe.
Pendant ces années, la distillerie bénéficie de 40 hectares de champs de canne à sucre, d’une usine sucrière, d’une distillerie d’alcools, de chais de vieillissement et d’une distillerie d’alcool pur. Au cours des années 1950, les stocks moyens s’élevaient à environ 15 000 fûts, soit environ 2 000 000 de litres d’alcool pur.
La nationalisation de l’ensemble des distilleries du pays par Castro en 1960 contraint la distillerie à fermer ses portes. Elle est alors transférée à Santa Cruz del Norte en 1970.
En 1993, le gouvernement cubain et le groupe français Pernod-Ricard s’allient pour rénover complètement la distillerie. En 2003, Havana Club International voit le jour ainsi que la nouvelle distillerie ultramoderne à San José de las Lajas, qui vient s’ajouter à celle de Santa Cruz del Norte et de Santiago de Cuba
Aujourd’hui, Havana Club International stocke plus de 20 000 000 de litres d’alcool pur répartis dans 168 000 fûts à San José de las Lajas. Produit à partir de mélasse cubaine, le rhum Havana Club, distribué par Pernod-Ricard, est devenu la quatrième marque de rhum la plus vendue au monde.
La distillerie Bacardi
L'histoire de Bacardi commence en 1862 lorsque Don Facundo Bacardi Massó fonde la marque à Santiago de Cuba. Il révolutionne le processus de fabrication du rhum en créant un spiritueux doux et léger.
L'épouse de Don Facundo, Doña Amalia, propose d'adopter la chauve-souris comme symbole de la marque, associée à la santé, à l'unité familiale et à la bonne fortune. Ce symbole devient emblématique et les habitants commencent à demander « el ron del murciélago » : le rhum de la chauve-souris.
L'expansion internationale suit son cours, cependant la prohibition aux États-Unis en 1920 force l'entreprise à fermer son usine de New York. Bacardi réagit en promouvant Cuba comme une échappatoire tropicale, attirant des Américains désireux de déguster le rhum Bacardi.
L'entreprise continue de croître, inaugurant l'Edificio Bacardi à La Havane, un gratte-ciel Art déco qui devient un lieu de rencontre. Aujourd'hui, Bacardi produit son rhum au Mexique et à Porto Rico, où ses distilleries restent parmi les plus grandes de l'entreprise.
L’entreprise monte de plus en plus en puissance et tend à renforcer la protection de sa marque, notamment en 1936 lorsqu'un tribunal de New York stipule qu'un cocktail portant le nom de Bacardi (le Bacardi Cocktail) doit être fait uniquement avec du rhum Bacardi.
Mais la prospérité de Bacardi sera heurtée de plein fouet par la prise au pouvoir de Castro à Cuba.
En 1960, les actifs de Bacardi à Cuba sont confisqués par le gouvernement révolutionnaire. La famille Bacardi continue ses activités à l'étranger après avoir transféré ses marques et levures hors de Cuba.
Le déménagement de Bacardi International Limited aux Bermudes en 1965 permet ainsi de créer un pont entre l’Europe et les États-Unis. Bacardi devient alors la marque de spiritueux haut de gamme la plus vendue au monde.
Les années 1990 voient la création de Bacardi Limited, regroupant plusieurs unités opérationnelles stratégiques, et l'ouverture de la Casa Bacardi à Porto Rico, un centre de visite ultramoderne. Bacardi innove avec le lancement de Bacardi Limón, qui devient le lancement de spiritueux le plus réussi de tous les temps.
Aujourd’hui, Bacardi est le deuxième rhum le plus vendu au monde.
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